Les services offerts aux joueurs compulsifs

Les études sur le jeu chez les adolescents de la Nouvelle-Écosse, du Québec, de l'Ontario et de l'Alberta sont les plus inquiétantes de toutes. Elles indiquent que les gouvernements encouragent le problème du jeu compulsif chez les jeunes. Dans certains cas, l'incidence du jeu compulsif et pathologique chez les jeunes s'est avérée sensiblement plus élevée que chez les adultes.

ENTREE

 

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Une seule étude canadienne a été consacrée exclusivement aux problèmes du jeu chez les femmes. Elle indique que celles-ci commencent à présenter autant de risques que les hommes.

Selon quelques études réalisées sur une petite échelle au Canada et aux États-Unis. les risques du jeu compulsif pour les Autochtones seraient plus élevés que pour la moyenne des gens. Les Autochtones sont également l'objet d'inquiétudes en raison des ententes spéciales qu'ils ont conclues avec les gouvernements qui leur permettent de commanditer des activités exploitant les jeux de hasard ou de prendre part aux bénéfices de ces activités. Les Autochtones bénéficient directement de l'exploitation de casinos en Saskatchewan, en Ontario et en Nouvelle- Écosse. En outre, des jeux de hasard sont organisés dans de nombreuses réserves au profit d'oeuvres de bienfaisance.

Les jeunes

Pour mieux prédire les futures tendances en matière de jeux de hasard, il est utile d'examiner les types de jeux auxquels s'adonnent les adolescents -- les joueurs adultes de demain. Les études démontrent que les joueurs compulsifs et pathologiques sont considérablement plus susceptibles de commencer à jouer plus jeunes que les joueurs non compulsifs. En Colombie-Britannique, par exemple, les joueurs compulsifs et pathologiques commençaient à jouer à 17 ans par opposition à 21 ans pour les joueurs non compulsives.  L'établissement de facteurs de risque concernant le jeu chez les adolescents pourrait aussi aider à cibler les adolescents les plus vulnérables et à élaborer des stratégies de traitement adaptées.

Quatre provinces seulement - la Nouvelle-Écosse, le Québec, l'Ontario et l'Alberta - ont mené des études portant expressément sur le jeu chez les adolescents. L'Alberta a également réalisé une étude sur le jeu chez les jeunes Autochtones. Les conclusions de ces études sont examinées séparément, les méthodes et les techniques de cotation variant de l'une à l'autre.

L'étude de la Nouvelle-Écosse sur le jeu chez les adolescents a été menée en 1993. Elle comportait une enquête auprès de 300 adolescents âgés de 13 à 17 ans. Le South Oaks Gambling Screen a été utilisé.

L'étude indiquait qu'environ 60 p. cent des enquêtés avaient joué pour de l'argent à un moment ou à un autre de leur vie. Comme le montre le tableau 17, les taux de jeu compulsif et pathologique chez les adolescents étaient considérablement plus élevés que ceux des adultes. Si l'on additionne les chiffres correspondant aux joueurs compulsifs et aux joueurs pathologiques, 11,7 p. cent des adolescents mais seulement 4,8 p. cent des adultes avaient des problèmes associés au jeu.

Les taux de jeu compulsif et pathologique sont plus élevés chez les adolescents que chez les adolescentes. En effet, 12,5 p. cent des adolescents étaient des joueurs compulsifs et 4,7 p. cent des adolescentes des joueuses compulsives. L'écart était beaucoup moins grand entre les joueurs pathologiques, qui représentaient 3,3 p. cent des adolescents et 2,7 p. cent des adolescentes.

Les adolescents des deux sexes commençaient généralement à jouer vers l'âge de 13 ans, le jeu compulsif apparaissait aux alentours de 14 ans et les premiers signes de jeu pathologique dès l'âge de 15 ans.

Les jeux de hasard favoris des adolescents en général étaient souvent de nature compétitive et comprenaient notamment le billard et des jeux autres que des jeux de cartes pour de l'argent. Les billets de loterie, les machines à sous et les machines de vidéopoker se trouvaient un peu plus bas dans la liste des préférences. La plus faible popularité des jeux de loterie pourrait être en partie justifiée par le fait que l'âge légal requis pour acheter des billets de loterie est de 19 ans. C'est peut-être aussi dû au fait que le jeu non compétitif n'attire pas les adolescents. D'une façon ou d'une autre, il est évident que la vérification de l'âge légal n'est pas effectuée de façon rigoureuse par les vendeurs de billets de loterie.

Chez les jeunes joueurs compulsifs et pathologiques, le billard et les autres jeux de ce genre donnant lieu à des paris demeuraient en tête de liste, les machines à sous, les machines de vidéopoker et les jeux de cartes pour de l'argent suivant de près. L'étude signalait, en guise d'avertissement, que les jeux vidéo étaient plus étroitement liés au jeu compulsif tant chez les adultes que chez les adolescents. Une fois de plus, il était évident que la loi n'était pas appliquée de façon stricte, étant donné que les appareils de loterie vidéo sont interdits au moins de 19 ans en Nouvelle-Écosse.

La somme médiane de 10 $ environ par semaine était consacrée aux jeux de hasard, bien que celle consacrée aux appareils de loterie vidéo s'élevait à 13,50 $. Les jeunes joueurs compulsifs et pathologiques consacraient 20 $ par semaine à leur passion. Par opposition, les joueurs adultes eux, dépensaient en général 95 $ par semaine dans les machines à sous ou les machines de vidéopoker, 120 $ par semaine en jeux de cartes et 100 $ par semaine au bingo.

L'étude menée en Nouvelle-Écosse ne demandait pas où les adolescents prenaient l'argent qu'ils engloutissaient dans les jeux de hasard. Cependant, les chercheurs ont constaté qu'en comparaison avec les joueurs pathologiques d'âge adulte, les jeunes joueurs pathologiques étaient beaucoup plus susceptibles d'avoir emprunté de l'argent de quelqu'un pour s'adonner au jeu et de ne pas avoir remboursé leur prêteur.

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Il ne semble pas y avoir de forte corrélation entre l'abus d'alcool et d'autres drogues et le jeu compulsif et pathologique. Selon les chercheurs ayant effectué cette étude, on constate la cooccurrence de la consommation d'alcool et d'autres drogues avec le jeu compulsif au sein du sous-échantillon composé par les jeunes mais il n'est pas évident qu'il y ait abus. C'est-à-dire qu'il se peut que les jeunes boivent et consomment de la drogue pendant qu'ils jouent mais cela ne constitue pas forcément une dépendance. Enfin, les jeunes joueurs pathologiques sont plus susceptibles que les autres adolescents de faire l'école buissonnière et de s'absenter de leur travail pour jouer.

L'étude du jeu chez les adolescents qui a été menée au Québec en 1986 était fondée sur un échantillon de 1 612 jeunes âgés de 14 à 18 ans qui venaient de différentes écoles secondaires de la région de Québec.(76) Les participants ont répondu à la version française d'un questionnaire mis au point par Lesieur et Klein plutôt qu'au questionnaire South Oaks Gambling Screen.

L'enquête de Lesieur et Klein faisait la distinction entre deux groupes principaux, les joueurs pathologiques et les joueurs non pathologiques. Pour être classé dans la catégorie des joueurs pathologiques, il fallait satisfaire à trois des sept critères suivants : 1) avoir des problèmes familiaux causés par le jeu; 2) avoir des problèmes dans le milieu de travail en raison du jeu; 3) mentir au sujet des gains et des pertes associés au jeu; 4) avoir emprunté de l'argent d'au moins quatre sources différentes pour s'adonner à des jeux de hasard; 5) être incapable de rembourser ses dettes de jeu; 6) avoir obtenu des prêts illégalement pour s'adonner à des jeux de hasard; 7) avoir posé des actes illicites pour se procurer l'argent nécessaire au jeu.

Soixante-seize pour cent des adolescents ayant répondu au questionnaire avaient joué à un jeu de hasard au moins une fois dans leur vie. Selon les critères de Lesieur et Klein, 3,6 p. cent d'entre eux pouvaient être considérés comme des joueurs pathologiques.

Dans l'étude du Québec, aucune question ne visait à savoir à quel âge les jeunes avaient commencé à jouer mais une étude menée auprès des adultes a permis de conclure que les joueurs compulsifs et pathologiques tendaient à commencer tôt. Dix pour cent de tous les répondants s'adonnant au jeu avaient commencé à parier avant l'âge de 15 ans. Chez les joueurs compulsifs et les joueurs pathologiques potentiels, la proportion des personnes ayant commencé à jouer pour de l'argent avant l'âge de 15 ans était de 26,4 p. cent.(77)

Les trois jeux favoris des adolescents québécois étaient les loteries (60 p. cent), les paris sportifs (45 p. cent) et les jeux de cartes (36 p. cent).(78) Les préférences des joueurs pathologiques n'étaient pas examinées séparément. Nombre d'adolescents québécois réussissaient de toute évidence à acheter des billets de loterie même s'ils n'avaient pas 18 ans.

Pour de nombreux étudiants québécois, les sommes maximales pouvant être consacrées au jeu en une seule journée allaient de 1 $ à 10 $. Dix-neuf pour cent des adolescents dépensaient cependant plus de 10 $.

Neuf jeunes joueurs sur dix se servaient de leur argent de poche et un sur dix allait jusqu'à dépenser l'argent de son dîner. Seulement cinq pour cent des jeunes joueurs avaient recours à des méthodes illégales pour financer leur passion. Les méthodes les plus communément utilisées étaient la vente de drogue, le vol d'argent auprès de personnes vivant avec eux et d'autres types de vol.

Quinze pour cent des participants empruntaient de l'argent pour s'adonner à des jeux de hasard ou pour payer leurs dettes de jeu : 8,9 p. cent empruntaient de l'argent auprès d'amis, 7,9 p. cent auprès de leurs parents, 6,5 p. cent de leurs frères et soeurs, 2,5 p. cent d'autres membres de la famille et 1,2 p. cent vendaient des biens personnels ou familiaux.

Quatre-vingt-dix pour cent des parents savaient que leurs enfants s'adonnaient à des jeux de hasard et la plupart ne s'y opposaient pas. D'un autre côté, 7,6 p. cent des jeunes gens disaient qu'au moins un de leurs parents jouait trop.

L'étude démontrait que le jeu chez les adolescents avait également des répercussions sur l'école et le travail. Par exemple, 5,4 p. cent des adolescents ayant participé à l'enquête ont admis avoir manqué des cours au moins une fois pour s'adonner à des jeux de hasard. Un autre 1,7 p. cent ont indiqué avoir des problèmes associés au jeu au travail et 1,3 p. cent ont dit avoir perdu du temps au travail en raison de leur passion pour le jeu.

Les résultats d'une étude effectuée en 1993 auprès de 1 320 élèves de la quatrième à la sixième année fréquentant des écoles primaires de la région de Québec sont encore plus surprenants que ceux de l'étude auprès des adolescents.(79) Un questionnaire portant sur les types de jeux de hasard préférés, les montants joués et la provenance de l'argent consacré au jeu avait été remis aux enfants. Les points liés au jeu pathologique n'étaient pas traités dans cette enquête.

Selon l'étude, 86 p. cent des enfants avaient déjà parié de l'argent ou engagé un objet qu'ils jugeaient précieux. Les quatre formes de jeu les plus populaires étaient les loteries (61,1 p. cent), le bingo (55,5 p. cent), les jeux de cartes pour de l'argent (53,3 p. cent) et les activités sportives (47,9 p. cent). Environ huit pour cent des enfants jouaient aux cartes pour de l'argent, faisaient des paris sportifs ou achetaient des billets de loterie au moins une fois par semaine. Quatre pour cent des enfants jouaient au bingo et trois pour cent au vidéopoker ou aux machines à sous une fois par semaine.

Nombre d'enfants ont dit avoir parié de l'argent pendant qu'ils étaient en compagnie de leurs parents.

La plupart des élèves utilisaient leur argent de poche pour jouer et seulement 1,6 p. cent ont admis avoir volé de l'argent dans ce but.

La majeure partie des montants joués étaient petits mais 19,5 p. cent des enfants ont déclaré avoir dépensé entre 5 $ et 10 $ pour des jeux de hasard en une seule journée, 8,3 p. cent avaient dépensé entre 10 $ et 15 $ et 11,4 p. cent plus de 15 $.

Comme les autres études sur les jeux de hasard, cette étude a permis de constater que les garçons étaient plus susceptibles de jouer et avaient tendance à consacrer davantage d'argent que les filles au jeu.

L'étude sur le jeu chez les adolescents menée en Ontario comportait 400 entrevues téléphoniques effectuées en 1994 auprès de jeunes gens âgés de 12 à 19 ans.(80) Tout comme dans le cas de l'étude auprès des adultes de l'Ontario, le système de cotation South Oaks Gambling Screen était utilisé. Les adolescents obtenant une cote entre un et quatre, sur 20 points, étaient classés comme étant des joueurs compulsifs et ceux qui avaient un résultat de cinq et plus étaient considérés comme des joueurs pathologiques potentiels. Seuls les jeunes répondant «non» aux 20 questions étaient classés comme n'ayant pas de problèmes de jeu. Comme pour l'étude auprès des adultes, seules les mesures concernant le jeu actuel étaient prises en considération.

Environ 65 p. cent des adolescents de l'Ontario avaient participé à au moins un jeu de hasard au cours des 12 mois précédents. Le tableau 18 illustre les taux de jeu compulsif. Chez les jeunes, 63 p. cent n'avaient pas de problèmes de jeu, 33 p. cent étaient classés comme étant des joueurs compulsifs et quatre pour cent des joueurs pathologiques potentiels. En comparaison, 91,4 p. cent des adultes de l'Ontario n'avaient pas de problèmes de jeu, 7,7 p. cent étaient des joueurs compulsifs et 0,9 p. cent des joueurs pathologiques.

TABLEAU 18: LE JEU COMPULSIF CHEZ LES JEUNES ET LES
ADULTES EN ONTARIO

 

Jeunes

Adultes

Échantillon

400

1 200

Pas de problèmes de jeu

63 %

91,4 %

Joueurs compulsifs

33 %

7,7 %

Joueurs pathologiques

4 %

0,9 %

 

 

 

Les chiffres sont saisissants en dépit du sévère système de cotation utilisé. Les adolescents de l'Ontario étaient au moins quatre fois plus susceptibles que les adultes d'être classés dans la catégorie des joueurs compulsifs ou dans celle des joueurs pathologiques. À mesure qu'ils vieillissaient, le taux de jeu compulsif augmentait. Le pourcentage passait de 27 p. cent chez les adolescents de 12 à 14 ans à 35 p. cent chez les jeunes de 15 à 17 ans, puis à 40 p. cent chez les jeunes de 18 ou 19 ans.

Si on les compare aux adolescentes, les adolescents étaient plus susceptibles d'avoir des problèmes de jeu (43 p. cent par opposition à 23 p. cent) et d'être des joueurs pathologiques potentiels (sept pour cent par opposition à deux pour cent).

L'étude indique que 34 p. cent des adolescents avaient joué aux cartes pour de l'argent au cours des 12 mois précédents, 31 p. cent avaient parié aux quilles, au billard, au golf ou à d'autres jeux d'adresse, 31 p. cent avaient acheté des billets de loterie instantanée, 25 p. cent avaient acheté des billets de loterie traditionnelle, 18 p. cent avaient joué au bingo et enfin, 17 p. cent avaient participé à des loteries sportives (Proline Sport Select).

Les jeunes avaient obtenu des billets de loterie bien qu'ils n'aient pas l'âge minimum exigé par la loi, soit 18 ans. L'achat de «gratteux» pourrait s'expliquer par le fait qu'il suffit de glisser quelques pièces dans une distributrice automatique non supervisée pour les obtenir.

Tout comme chez les adultes, les dépenses associées au jeu chez les adolescents de l'Ontario augmentaient avec l'intensité de la passion du jeu. Chez les adolescents n'ayant pas de problèmes de jeu, 25 p. cent avaient dépensé jusqu'à 10 $ en une seule journée; ce qui se compare à 60 p. cent chez les joueurs compulsifs. Parmi les joueurs pathologiques potentiels, 41 p. cent avaient joué jusqu'à 10 $ en une seule journée et 53 p. cent jusqu'à 100 $.

Pour payer leurs dettes de jeu, les adolescents avaient recours aux deux principaux moyens suivants : demander des fonds à leurs parents (24 p. cent) et utiliser l'argent qui leur était alloué pour leurs dîners (16 p. cent). Parmi les autres sources de fonds, citons : les membres de la famille (neuf pour cent); la vente de biens personnels (sept pour cent); les banques, les sociétés de prêts ou les caisses populaires (quatre pour cent); voler de l'argent à leurs parents ou à leurs colocataires (quatre pour cent); et les cartes de crédit (deux pour cent).

Quinze pour cent des adolescents n'ayant pas de problèmes associés au jeu avaient un ami ou un membre de leur famille qui avait un problème de jeu. Cette proportion passait à 29 p. cent chez les adolescents ayant «quelques problèmes de jeu» et à 47 p. cent chez les adolescents étant considérés comme des joueurs pathologiques potentiels. En fait, les adolescents dont un membre de la famille avait un problème de jeu étaient deux fois plus susceptibles d'avoir ce genre de problème eux-mêmes.

L'étude menée en Ontario a permis de constater que les adolescents ayant des problèmes de jeu avaient davantage tendance à commettre des actes criminels. Au sein de la population en général un pour cent des adolescents de l'Ontario faisaient l'objet de poursuites judiciaires au moment du sondage tandis que six pour cent des adolescents ayant des problèmes de jeu ou étant considérés comme des joueurs pathologiques potentiels étaient aux prises avec de tels problèmes.

L'enquête sur les jeunes de l'Alberta a été effectuée par téléphone en 1995 auprès de 972 adolescents de 12 à 17 ans.(81) Le questionnaire comprenait une version de la grille South Oaks Gambling Screen adaptée pour les jeunes. Par exemple, là où la version adulte demande au répondant s'il a déjà eu une marge de crédit dans un casino ou chez un agent de paris, la version pour les jeunes lui demande s'il a déjà joué l'argent de son repas du midi.

On a utilisé le système habituel de cotation de la grille mais avec une terminologie adaptée : on a appelé «joueurs à risques», plutôt que «joueurs compulsifs», les adolescents qui ont obtenu les cotes trois ou quatre et «joueurs compulsifs», plutôt que «joueurs pathologiques probables», ceux qui ont obtenu des cotes de cinq ou plus.

Le tableau 19 compare les conclusions de l'étude sur les jeunes à celles d'une étude semblable de 1993 sur les adultes albertains. En additionnant les chiffres des deux dernières rangées, on constate que le pourcentage d'Albertains susceptibles d'avoir des problèmes de jeu est quatre fois plus élevé chez les adolescents que chez les adultes : 23 p. cent contre 5,4 p. cent.

TABLEAU 19: LE JEU COMPULSIF CHEZ LES ADOLESCENTS ET LES
ADULTES EN ALBERTA

 

Adolescents

Adultes

Taille de l'échantillon

972

1 803

Non-joueurs

33 %

7 %

Joueurs non compulsifs

44 %

87 %

Joueurs à risques (jeunes) ou
joueurs compulsifs (adultes)

15 %

4 %

Joueurs compulsifs (jeunes) ou
joueurs pathologiques probables (adultes)

8 %

1,4 %

 

 

 

Les pourcentages de jeunes ayant des problèmes de jeu étaient plus élevés que dans un certain nombre d'autres provinces ou territoires. Le rapport attribue cette situation à un certain nombre de facteurs : par exemple, en Alberta, les formes de jeu autorisées sont plus nombreuses et existent depuis plus longtemps que dans la plupart des autres provinces ou territoires; en outre, les profits du jeu servent souvent à financer des programmes récréatifs, sportifs, sociaux et culturels à l'intention des jeunes. Le rapport ajoute :

"Les adultes qui abhorrent la consommation d'alcool par les mineurs et l'usage des drogues voient souvent l'habitude du jeu chez les jeunes comme un passe-temps inoffensif. En fait, de nombreux parents achètent des billets de loterie à leurs enfants, les amènent au bingo ou prennent parfois avec eux de petits paris sur les résultats de divers événements."(82)

Les jeunes mentionnés dans l'étude albertaine jouaient à des jeux très variés. Les adolescents ayant des problèmes de jeu étaient quatre fois plus portés que les autres à tirer à pile ou face pour de l'argent, trois fois et demie plus portés à aller jouer au poker chez des amis, trois fois plus portés à fréquenter les casinos locaux ou à jouer à des jeux d'argent électroniques ou vidéo et deux fois et demie plus portés à acheter Sport Select.

La grande majorité de ces trois groupes de joueurs adolescents avaient commencé à jouer avant 16 ans. Environ 29 p. cent des joueurs non compulsifs, 34 p. cent des joueurs à risques et 48 p. cent des joueurs compulsifs avaient fait leur premier pari avant 11 ans.

Les joueurs à risques et compulsifs ont indiqué avoir souffert personnellement du jeu. Par exemple, 74 p. cent des joueurs compulsifs ont consacré au jeu plus de temps ou d'argent qu'ils ne le voulaient, 81 p. cent ont tenté de «se refaire» en retournant jouer après avoir perdu, 46 p. cent ont admis s'en vouloir de jouer et 40 p. cent ont raconté avoir gagné quand en fait ils avaient perdu.

Comme dans d'autres études, les joueurs compulsifs adolescents de l'Alberta avaient tendance à dépenser plus d'argent au jeu que les autres. Ils consacraient en moyenne 11,17 $ par mois à des jeux d'adresse, 11,05 $ aux casinos locaux, 6,36 $ à des paris sportifs entre particuliers, 5,51 $ à Sport Select et 5,17 $ aux jeux d'argent électroniques et vidéo.

Enfin, l'étude albertaine indiquait que les joueurs compulsifs risquaient plus que les autres d'avoir des problèmes avec la justice et de boire ou de fumer. Vingt-neuf pour cent des joueurs compulsifs de l'étude ont déclaré avoir eu des difficultés avec la police dans les 12 mois précédents l'étude, contre seulement 12 p. cent chez les joueurs non compulsifs. Les joueurs compulsifs avaient en outre plus tendance que les autres à boire souvent et plus d'un verre chaque fois et à fumer tous les jours. Par contre, un faible pourcentage de joueurs compulsifs fumaient de la marijuana, consommaient d'autres drogues illicites ou respiraient des solvants de façon régulière.

L'Alberta Alcohol and Drug Abuse Commission a également commandité un rapport de 1995 sur le jeu, intitulé Firewatch on Aboriginal Adolescent Gambling. L'étude s'ouvre sur les observations suivantes :

"Le feu évoque pour nous chaleur, camaraderie et prospérité. Toutefois, sans prudence ni respect, il peut aussi engendrer le chaos et la destruction.

Pour notre jeunesse, le jeu est comme le feu. Il fait aussi rêver de prospérité, d'amitié et d'une solution à tous les problèmes. Mais sans prudence, il peut aussi être destructif.

Qui se frotte au jeu, peut s'y brûler. Face au danger, il faut nous montrer vigilants et aider nos jeunes à adopter une attitude prudente et saine."(83)

Un nombre total de 961 élèves de la cinquième à la douzième année fréquentant 28 écoles différentes ont été interrogés dans le cadre de cette étude. Une version révisée du South Oaks Gambling Screen dans laquelle les 20 critères habituels ont été réduits à 12 a été utilisée.(84) Une cote de zéro ou de un correspondait à un adolescent n'ayant pas de problèmes associés au jeu, une cote de deux ou de trois indiquait un jeune «à risque» et un résultat de quatre ou plus permettait de déceler un joueur compulsif. Étant donné les différences dans la formulation des questions et dans l'attribution des cotes, les résultats de l'enquête auprès des Autochtones ne peuvent pas se comparer avec ceux de l'enquête générale auprès des adolescents de l'Alberta.

Les résultats de cette étude sont présentés au tableau 20. Près de la moitié (49 p. cent) des répondants étaient des joueurs compulsifs ou risquaient de le devenir.

TABLEAU 20: LA PRÉVALENCE DES PROBLÈMES DE JEU CHEZ
LES JEUNES AUTOCHTONES DE L'ALBERTA, 1995

 

Proportion de l'échantillon

Échantillon

961

Ne joue pas

11 %

Pas de problèmes de jeu

38 %

À risque

21 %

Joueur compulsif

28 %

 

 

Les facteurs comme l'âge et le sexe ont plus ou moins la même portée que dans les autres études. On retrouvait plus de garçons chez les joueurs compulsifs et ils avaient tendance à commencer à jouer à un âge moins avancé que leurs compagnons de classe n'ayant pas de problèmes de jeu. Des conclusions analogues ont été tirées en ce qui concerne l'impact intergénérationnel -- le comportement des parents à l'égard du jeu ayant une influence considérable sur le comportement de leurs enfants sur ce plan.

Parmi les jeunes joueurs, 64 p. cent jouaient en une occasion moins de 10 $. Vingt pour cent jouaient entre 10 $ et 50 $, huit pour cent entre 50 $ et 100 $, trois pour cent entre 100 $ et 200 $ et quatre pour cent 200 $ ou plus.

Nombre de jeunes répondants avaient connu le deuil de parents proches ou d'amis. Parmi les joueurs jugés à risques ou compulsifs, 44 p. cent avaient perdu au moins un ami depuis deux ans. Parmi les joueurs à risques, 77 p. cent avaient perdu au moins un parent proche depuis deux ans. Dans les deux cas, ces pourcentages sont sensiblement plus élevés que pour les non-joueurs et les joueurs non compulsifs.

Il n'y avait pas de différence sensible entre les groupes en ce qui concerne la participation à des manifestations culturelles ou à d'autres types d'activités parascolaires non sportives. L'activité sportive était associée à une incidence plus élevée du jeu compulsif. Ces conclusions infirment l'hypothèse que le goût du jeu naît de l'ennui. Selon l'étude, «on ne semble pas jouer par manque d'occasions ou d'intérêt pour d'autres activités; offrir aux jeunes plus d'activités ne réglerait donc sans doute pas le problème. [...] Toutefois, étant donné leur popularité, ces activités pourraient servir de relais à des moyens de prévention du jeu compulsif.»(85)

Les femmes

Au Canada, le jeu a déjà été en grande partie la chasse gardée des hommes mais la situation a commencé à changer avec l'essor du jeu légalisé vers le milieu des années 1960. Là où on peut comparer les taux de jeu compulsif pour toute une vie et les taux actuels, les études démontrent de plus en plus que les femmes sont tout aussi susceptibles que les hommes d'être classées dans la catégorie des joueurs compulsifs actuels. Cette tendance est évidente en Colombie-Britannique et en Alberta. Les chercheurs de l'Alberta en sont en effet arrivés à la conclusion que les femmes commencent à apparaître comme le sexe le plus susceptible d'avoir des problèmes associés au jeu.(86)

Nous ne disposons pas encore de nombreux travaux de recherche sur les joueuses compulsives, à l'exception toutefois de l'étude innovatrice intitulée Female Problem Gamblers in Alberta. La présente partie du rapport repose énormément sur cette étude. D'autres études sont aussi mentionnées lorsque leurs conclusions corroborent celles de l'Alberta ou s'en éloignent considérablement.

Selon l'étude de l'Alberta, les hommes sont plus susceptibles que les femmes d'être des joueurs compulsifs suivant les mesures de toute une vie (62 p. cent des joueurs compulsifs sur toute une vie étaient des hommes) mais les femmes sont tout aussi susceptibles que les hommes d'avoir actuellement des problèmes associés au jeu. Ces conclusions sont un peu curieuses en ce sens que les femmes ont tendance à considérer le jeu sous un éclairage plus négatif que les hommes. Elles semblent aussi beaucoup plus conscientes des risques du jeu compulsif et pathologique. Une étude effectuée en Ontario indique que les femmes convenaient plus facilement que le jeu constituait une perte d'argent et de temps et que les chances de gagner étaient si minces qu'il était absolument ridicule de jouer.(87) Selon la même étude, les femmes sont plus susceptibles que les hommes de rejeter l'idée que les jeux de hasard permettent de s'amuser sans faire de mal à personne. Elles étaient aussi moins susceptibles d'être en faveur de l'ouverture d'un casino dans leur quartier.

En plus de son étude principale sur le jeu, l'Alberta avait commandé une analyse secondaire présentant le profil de la joueuse compulsive. Comme l'échantillon examiné était au nombre de 49 seulement, les résultats ont été décrits comme des impressions plutôt que des conclusions.(88)

Si on les compare aux joueuses non compulsives, les joueuses compulsives avaient tendance à être jeunes. Elles étaient deux fois plus susceptibles d'être âgées de moins de 25 ans. De plus, elles étaient moins susceptibles d'être mariées ou conjointes de fait et deux fois plus susceptibles d'être célibataires.

Les joueuses compulsives de l'Alberta étaient un peu plus susceptibles que les joueuses sans problèmes d'avoir un revenu annuel de moins de 15 000 $ ou de plus de 50 000 $ pour leur ménage. Le phénomène du revenu inférieur chez les joueuses compulsives se reflète dans leur niveau de scolarité et leur situation professionnelle. Les joueuses compulsives sont considérablement plus susceptibles d'avoir fait des études secondaires non achevées ou moins. Elles étaient aussi plus susceptibles d'occuper un emploi de bureau que d'être membres d'une profession libérale. En outre, les chômeuses étaient trois fois plus nombreuses chez les joueuses compulsives que chez les joueuses non compulsives.

L'étude menée en Alberta a permis de constater que les joueuses compulsives, tout comme les joueurs compulsifs, jouaient souvent pour se distraire ou pour gagner de l'argent. En-dehors de ces deux raisons, on constate des différences frappantes entre leur motivation et celle des hommes, comme l'indique le tableau 21.

TABLEAU 21: LES RAISONS DONNÉES PAR LES JOUEURS COMPULSIFS EN ALBERTA

 

Les joueuses
compulsives actuelles

Les joueurs
compulsifs actuels

Échantillon

49

50

 

 

 

Pour s'amuser et se distraire

90 %

92 %

Pour gagner de l'argent

84 %

94 %

Pour connaître une sensation
forte et un défi

78 %

88 %

Pour une bonne cause

74 %

52 %

Par curiosité

41 %

48 %

Pour faire quelque chose entre amis

39 %

44 %

Pour échapper aux soucis quotidiens

39 %

28 %

Comme passe-temps

35 %

28 %

Parce que je me débrouille bien

27 %

48 %

Pour être seul(e)

18 %

14 %

 

 

 

Les femmes étaient plus susceptibles que les hommes de jouer pour une bonne cause (74 p. cent par opposition à 52 p. cent). Elles étaient aussi plus susceptibles de jouer pour oublier leurs soucis quotidiens que les joueurs compulsifs (39 p. cent par opposition à 28 p. cent) et moins susceptibles de jouer parce que ça leur procurait une sensation forte ou leur permettait de relever un défi (78 p. cent par opposition à 88 p. cent). Ce phénomène a été corroboré par d'autres études qui caractérisent les femmes comme des joueuses «d'évasion» et les hommes comme des joueurs «à la recherche de sensations fortes».(89) Comparées aux joueurs compulsifs, les joueuses compulsives sont beaucoup moins susceptibles de déclarer qu'elles jouent parce qu'elles se débrouillent bien au jeu (27 p. cent par opposition à 48 p. cent).

Les différences touchant les préférences entre les joueuses compulsives et les joueurs compulsifs sont frappantes et la plus saisissante est sans doute l'attitude de ces deux groupes à l'égard du bingo. Le bingo est l'un des trois types de jeu les plus prisés par les femmes selon l'étude de l'Alberta tandis qu'il se trouve tout au bas de la liste des jeux préférés par les hommes.

TABLEAU 22: LES JEUX PRÉFÉRÉS PAR LES JOUEUSES COMPULSIVES ET
LES JOUEURS COMPULSIFS DE L'ALBERTA, 1993

 

Joueuses compulsives
actuelles

Joueurs compulsifs
actuels

Échantillon

49

50

Instantanés ou «gratteux»

92 %

88 %

Jeux de loterie

78 %

86 %

Bingo

76 %

24 %

Billets de tombola ou de levées de fonds

70 %

74 %

Appareils de loterie vidéo

41 %

46 %

Jeux de cartes en famille ou entre amis

41 %

64 %

Billets en pochette et billets Nevada

41 %

40 %

Casinos locaux

37 %

46 %

Paris sportifs informels, repêchage

27 %

54 %

Courses de chevaux

27 %

34 %

Machines à sous

22 %

32 %

Jeux d'adresse (billard, fléchettes et golf)

22 %

54 %

Paris sportifs officiels

18 %

24 %

Loteries sportives

14 %

40 %

Loteries quotidiennes (la Quotidienne)

14 %

18 %

Investissements spéculatifs

14 %

38 %

Jeux de cartes ou de dés dans un casino
hors de l'Alberta

10 %

28 %

Jeux de cartes dans une salle de jeu

6 %

30 %

Jeux d'arcade ou jeux vidéo
pour de l'argent

4 %

18 %

Paris sportifs avec un preneur
de paris clandestins

0 %

4 %

 

 

 

Comme le tableau 22 à la page précédente l'indique, 76 p. cent des joueuses compulsives actuelles ont joué au bingo à un moment ou à un autre de leur vie, par opposition à seulement 24 p. cent des joueurs compulsifs actuels.

D'un autre côté, les joueuses compulsives étaient beaucoup moins susceptibles que les joueurs compulsifs de jouer aux cartes, de s'adonner à divers types de paris sportifs, à des jeux d'adresse ou à des investissements spéculatifs.

Les joueurs compulsifs des deux sexes consacrent nettement plus d'argent au jeu par mois que les joueuses et les joueurs non compulsifs. L'étude menée en Alberta signale que les joueuses et les joueurs compulsifs dépensent environ cinq fois plus par mois pour s'adonner à toutes sortes de jeux de hasard que les joueuses et les joueurs non compulsifs. Les joueuses compulsives dépensent beaucoup moins que les joueurs compulsifs dans tous les types de jeu à l'exception du bingo et des billets en pochette.

Le tableau 23 à la page suivante présente les dépenses mensuelles moyennes des joueurs compulsifs et non compulsifs de l'Alberta. Les joueuses compulsives ont dépensé davantage d'argent au bingo (89,08 $ par mois en moyenne) qu'à tout autre jeu. Ce total constitue également le montant mensuel moyen le plus élevé consacré à tout type de jeu par des joueurs compulsifs des deux sexes. Les joueurs compulsifs actuels dépensent souvent des sommes considérables aux cartes, aux dés et aux courses -- trois activités auxquelles les joueuses compulsives consacrent très peu de leur revenu.

TABLEAU 23: SOMMES D'ARGENT MOYENNES CONSACRÉES
MENSUELLEMENT AU JEU EN ALBERTA, 1993

 

Joueuses
compulsives
actuelles

Joueuses
non
compulsives
actuelles

Joueurs
compulsifs
actuels

Joueurs
non
compulsifs
actuels

Échantillon

49

836

50

686

Bingo

89,08 $

7,33 $

6,06 $

1,60 $

Appareils de loterie vidéo

33,20

2,16

48,74

4,35

Billets en pochette

17,82

1,29

5,60

1,25

Instantanés ou «gratteux»

12,51

4,07

13,54

4,76

Loteries

11,96

7,68

17,32

10,65

Casinos locaux

10,41

2,17

13,56

1,77

Jeux de cartes ou de dés
dans un casino

7,16

1,99

42,92

6,24

Sports entre amis ou avec
des compagnons de travail

2,96

1,38

7,28

3,49

Jeux de cartes entre amis
ou en famille

2,92

0,67

15,04

5,77

Tombolas

2,63

5,08

6,86

4,88

Machines à sous

2,04

2,80

8,16

3,19

Courses de chevaux

0,90

1,90

66,40

3,49

Jeux d'adresse

0,86

0,32

13,54

4,20

 

 

 

 

 

Les joueurs non compulsifs tendaient à jouer des sommes plus élevées par jour que les joueuses non compulsives. On retrouve la même tendance chez les joueuses et les joueurs compulsifs. Quatorze pour cent des joueurs compulsifs avaient joué plus de 10 000 $ en une seule journée par opposition à quatre pour cent seulement chez les femmes.

D'autres études analogues à celle de l'Alberta ont également permis de constater la tendance générale qu'ont les hommes à jouer des sommes supérieures. L'étude effectuée en Saskatchewan montre que les hommes consacrent en moyenne 60 $ par mois à des jeux de hasard, en comparaison avec 26 $ par mois chez les femmes.(90) En Colombie-Britannique, les hommes ont indiqué qu'ils dépensaient 126 $ par mois et les femmes 68 $. Par ailleurs, les hommes dépensaient en moyenne 244 $ à chaque séance de jeu et les femmes 110 $ seulement.(91)

Les Autochtones

Deux études sur le jeu chez les Autochtones ont été menées au Canada, toutes deux en Alberta. L'étude sur le jeu chez les adolescents autochtones est décrite dans la présente section. L'autre étude, intitulée Spirit of Bingoland: A Study of Problem Gambling Among Alberta Native People, a été réalisée en 1994 auprès d'un groupe choisi de personnes de 15 ans et plus.

Un échantillon de 149 personnes ayant été sélectionnées au départ par leur collectivité en tant que joueurs «invétérés» a été utilisé dans le cadre de l'étude intitulée Spirit of Bingoland. Par conséquent, les taux de jeu compulsif et pathologique constatés étaient très élevés. Compte tenu de la nature sélective de l'échantillon, il est impossible de comparer les conclusions de cette étude avec d'autres études provinciales.

Les chercheurs ont eu recours au South Oaks Gambling Screen pour effectuer l'étude mais le groupe des joueurs pathologiques était subdivisé. Un joueur obtenant une cote de cinq à neuf était considéré comme un joueur pathologique moyen tandis qu'un joueur obtenant dix ou plus entrait dans la catégorie des joueurs pathologiques graves. Vingt-deux pour cent de l'échantillon entraient dans la catégorie des joueurs compulsifs, 40 p. cent étaient considérés comme étant des joueurs pathologiques moyens et 15 p. cent des joueurs pathologiques graves.

Les joueurs s'adonnaient avant tout aux jeux de hasard pour les trois principales raisons suivantes : pour gagner de l'argent (94 p. cent); pour se distraire et s'amuser (91 p. cent); pour connaître une sensation forte ou un défi (84 p. cent). Il importe également de noter que 29 p. cent des Autochtones interrogés ont indiqué qu'ils jouaient pour être seuls -- une motivation que l'on retrouvait également dans l'étude sur la population en général de l'Alberta et de la Colombie-Britannique.(92)

Le bingo se trouvait en tête de la liste des activités préférées, comme le montre le tableau 24. La grande majorité des répondants avaient déjà joué au bingo au cours de leur vie ainsi que de l'année venant de s'écouler et 46 p. cent d'entre eux jouaient au moins une fois par semaine. Dans l'étude principale de l'Alberta, le bingo était beaucoup moins populaire parmi les joueurs compulsifs et pathologiques. Seulement 11 p. cent jouaient au bingo à chaque semaine.

TABLEAU 24: LES TYPES DE JEUX DE HASARD ET LA FRÉQUENCE DU JEU
CHEZ L'ÉCHANTILLON AUTOCHTONE DE L'ALBERTA, 1994

 

Déjà
joué

Joué au
cours de
l'année

Joué au moins
une fois la
semaine

Bingo

89 %

86 %

46 %

Instantanés et «gratteux»

88 %

81 %

26 %

Jeux de type loterie

82 %

81 %

33 %

Tombolas ou billets de levées de fonds

72 %

69 %

24 %

Billets en pochette ou billets Nevada

68 %

61 %

25 %

Appareils de loterie vidéo ou machines à sous
vidéo dans les bars ou les tavernes

61 %

59 %

29 %

Jeux de cartes entre amis ou en famille
pour de l'argent

44 %

39 %

36 %

Courses de chevaux

42 %

34 %

15 %

Casinos locaux

32 %

24 %

16 %

Paris sportifs officiels parrainés
par des organismes de bienfaisance

30%

27 %

26 %

 

 

 

 

En comparaison avec les dépenses mensuelles moyennes de 236 $ des joueurs compulsifs et pathologiques constatées par l'étude de l'Alberta portant sur la population en général, les joueurs compulsifs et pathologiques autochtones de l'Alberta ont déclaré consacrer en moyenne 639 $ par mois au jeu. Le tableau 25 à la page suivante présente les dépenses mensuelles moyennes associées à des types précis d'activités. Les activités sont classées en fonction des sommes d'argent que les joueurs compulsifs et pathologiques autochtones y engloutissent.

La première place revient aux courses de chevaux, les Autochtones interrogés dépensant en moyenne 336 $ par mois dans les hippodromes -- c'est-à-dire presque 11 fois plus que les joueurs compulsifs et pathologiques ayant participé à l'étude générale de l'Alberta. En deuxième position, on retrouve le bingo, l'activité la plus populaire auprès des Autochtones. Les appareils de loterie vidéo constituent un autre exemple frappant car les Autochtones y consacrent des sommes environ six fois supérieures à celles dépensées par les joueurs compulsifs et pathologiques ayant fait l'objet de l'étude principale sur l'Alberta.

TABLEAU 25: LES DÉPENSES MENSUELLES DES JOUEURS COMPULSIFS
ET PATHOLOGIQUES AU SEIN DE L'ÉCHANTILLON AUTOCHTONE
ET DANS L'ENSEMBLE DE LA POPULATION DE L'ALBERTA

 

Échantillon
autochtone

Population
générale

Échantillon

149

153

Courses de chevaux

336 $

31 $

Bingo

272

37

Appareils de loterie vidéo ou machines à sous vidéo

182

28

Casinos locaux

55

12

Billets en pochette ou billets Nevada

34

10

Jeux de type loterie

32

11

Jeux de cartes entre amis ou en famille pour de l'argent

30

8

Instantanés ou «gratteux»

26

10

Tombolas ou billets de levées de fonds

15

6

 

 

 

Plus de 40 p. cent de l'ensemble des répondants autochtones se tournaient vers leur conjoint ou un membre de leur famille pour obtenir de l'argent leur permettant de jouer ou de payer leurs dettes de jeu. Pour plus de détails, voir le tableau 26. Les joueurs autochtones considérés comme ayant des problèmes de jeu utilisaient surtout les prestations d'aide sociale et les allocations familiales pour jouer régulièrement. Les joueurs pathologiques graves préféraient emprunter l'argent du ménage ou emprunter des sommes d'argent auprès de leur conjoint ou d'autres membres de leur famille mais ils étaient plus aptes à utiliser de nombreuses sources de financement. En règle générale, chaque type d'emprunt augmentait à mesure que les problèmes associés au jeu devenaient plus graves.

TABLEAU 26: LES EMPRUNTS AU SEIN DE L'ÉCHANTILLON AUTOCHTONE DE L'ALBERTA

 

Échantillon
total

Joueurs non
compulsifs

Joueurs
compulsifs

Joueurs
pathologiques
modérés

Joueurs
pathologiques
graves

Emprunt auprès du conjoint

44 %

11 %

31 %

50 %

90 %

Emprunt auprès d'un
membre de la famille

43 %

17 %

22 %

52 %

83 %

Prestations d'aide sociale
ou allocations familiales

38 %

6 %

41 %

44 %

62 %

Utilisation de l'argent du
ménage

37 %

6 %

16 %

40 %

93 %

Mise en gage de biens
personnels ou familiaux

28 %

6 %

13 %

29 %

72 %

Emprunt sur cartes de crédit

22 %

11 %

19 %

15 %

48 %

Emprunt non remboursé

17 %

0 %

3 %

15 %

55 %

Chèques sans provision

11 %

0 %

3 %

12 %

31 %

Retrait d'économies ou
de fonds de pension

9 %

3 %

0 %

8 %

31 %

Emprunt bancaires

5 %

0 %

0 %

0 %

28 %

Emprunt d'usuriers

1 %

0 %

0 %

4 %

0 %

 

 

 

 

 

 

L'étude renforce l'observation générale selon laquelle les joueurs compulsifs sont souvent des polytoxicomanes, ou l'ont déjà été. Soixante-treize pour cent des répondants fumaient, 60 p. cent étaient d'anciens alcooliques ou toxicomanes et 26 p. cent consommaient de l'alcool ou d'autres drogues au moment de l'étude. Cependant, aucune corrélation n'a été faite entre la consommation d'alcool et d'autres drogues et la gravité du jeu compulsif.

VI. Conclusions et Recommandations
Table des matières