Re: Les Békés Maitres absolus de la Martinique ??
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Auteur : L'histoire des Antilles
01-02-2010
Qui sont les « békés », ces « créoles blancs » dont vous parlez ? Ils descendent (1) de différents types de colons (2), arrivés d’Europe tout au long de la colonisation, laquelle ne s’est pas arrêtée à l’abolition de l’esclavage. Dans les premiers temps, il y eut quelques nobles cadets de famille, mais surtout des marins, des soldats, des commerçants, des ouvriers, des agriculteurs, des engagés (blanc travaillant 3 ans sur une plantation), des indigents envoyés de force aux Antilles. Les femmes, peu nombreuses au début de la colonisation, étaient pauvres et de milieu modeste ; certaines, orphelines, étaient aussi envoyées de force.
Certaines familles « békés » descendent également d'étrangers tels que des hollandais de confession protestante, chassés du Brésil, qui amenèrent la culture de la canne à sucre. Il y eut aussi des anglais, envoyés pendant les périodes où l’Empire colonial britannique possédait l’île.
A la Guadeloupe, les « békés » de la période de l’esclavage furent en grande partie massacrés en 1794 sous la dictature de Victor Hugues, alors commissaire de la République. Ainsi les blancs présents en Guadeloupe proviennent très majoritairement de la métropole bien après l'abolition de l'esclavage en 1848 et surtout au cours de la seconde moitié du 20ème siècle. De même, à la Martinique de nombreux blancs sont arrivés, après cette date, de toutes régions françaises ou européennes. Ces derniers sont aussi appelés « békés » dans le langage courant. Une très forte proportion des « békés » a disparu, avec la totalité des habitants de Saint-Pierre, lors de l’éruption du Mont Pelé le 9 mai 1902. Encore aujourd’hui des européens arrivent avec un billet d’avion aller sans retour.
Ainsi quel poids ces gens majoritairement modestes, souvent sans instruction, avaient-ils pour décider quoi que ce soit ? N’étaient-ils pas le plus souvent ou bien de simples aventuriers en mal d’exotisme, pour les volontaires, ou bien des exécutants, aucun n’ayant de pouvoir sur les décisions concernant la colonisation et l’esclavage, prises en hauts lieux, dans les salons des capitales ou autres villes françaises ou européennes, dans les Assemblées nationales ?
Des archives notariées nombreuses permettent d’établir, qu’aux Antilles même, des personnes noires libres possédaient aussi des esclaves. Doivent-elles être aussi qualifiées d’« esclavagistes » ? Les colons, volontaires ou non, exploitaient les terres des colonies, possédées par la Métropole, en utilisant la main-d’oeuvre qui leur était envoyée, à savoir les esclaves. L’esclavage était pour ces gens des colonies un fait mondial de société dont tout un chacun, vous le savez, profitait (3). On voit donc que ceux qui doivent être effectivement nommés « esclavagistes », ceux que le dictionnaire de l’Académie Française définit par : « Qui veut maintenir l'esclavage des nègres ou Qui en fait la traite », ne sont pas d’abord à chercher de ce côté-ci, même si l’on doit reconnaître que certains ont participé à ce crime contre l’humanité. N’occultons pas les autres.
(1) Voir par exemple pour le début le la colonisation le livre de Léo Elizabeth : «La société martiniquaise aux XVIIe et XVIIIe siècles, 1664‐1789 », Ed. Karthala, 2003, 526 pages, (dont 24 pages de bibliographie). On y apprend des choses très surprenantes, dès les premières pages.
Par exemple « un blanc peut‐être l’engagé d’un noir libre » page 26 en bas. Ou encore « Dans la catégorie des blancs et assimilés, entre 1660 et 1667, une personne sur quatre vit sous la dépendance d’une autre. », page 31. Ou encore même page : « Plus souvent, le capitaine du navire qui l’a transporté (l’engagé) le vend à l’arrivée à un habitant pour trente six mois, jusqu’à la décision du 28 février 1670. Pour attirer les candidats, la durée du service est alors ramenée à 18 mois ».
(2) Au sens Petit Robert de « Personne qui est allée peupler, exploiter une colonie – Habitant d’une colonie ressortissant de la Métropole ».
(3) Vous n’ignorez pas, qu’à la même période de l’esclavage dit « triangulaire », il y avait en méditerranée un non moins terrifiant trafic d’esclaves blancs. Voir Robert C. DAVIS « Esclaves chrétiens, maîtres musulmans » Ed. Jacqueline Chambon, 2006, 420 pages. Il est écrit ailleurs :« Environ un million à 1.250.000 Européens, pour la seule période comprise entre 1530 et 1780 – période de forte activité barbaresque en Méditerranée et dans l’Atlantique – furent enlevés de force au cours des razzias sur les littoraux italiens, français, espagnol,
sicilien, corse en Méditerranée et dans l’Atlantique ». Ou encore : « Au XVIIe siècle, il y eu davantage d’esclave blancs déportés annuellement aux Amériques que d’Africains » : Arnaud Raffard de Brienne : « La désinformation autour de l’esclavage », Ed. Atelier Fol’fer, coll. L’Etoile du berger, 2006. Pages 44 et 45. « Ces références font tomber l’argument selon lequel l’esclavage aurait été la conséquence d’un racisme préexistant à l’encontre des noirs », p. 45.
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